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Dossier Août 2003

Voir le Cachet du 06 Mai 1967, Bordeaux (Gironde) France, en rapport avec ce dossier
Voir la Flamme du Vendredi 25 Avril 1986, Bordeaux (Gironde) France, en rapport avec ce dossier

LE GRAND PONT DE BORDEAUX
Une histoire en plusieurs volets...


Je tiens tout d'abord à remercier les Archives Municipales de Bordeaux, et plus particulièrement MadAme Vatican, qui m'a fourni en juillet 2001 tout un dossier sur la construction du nouveau grand pont Suspendu de Bordeaux. Ce dossier est issu du Service documentation de la D.D.E de la Gironde ; il est constitué d'un article paru dans la revue Travaux en octobre 1967. Je me suis aidé de ce dernier pour vous présenter durant deux mois un résumé sur la construction de ce pont.

Avant de rentrer plus en détail dans l'édification dece superbe pont Suspendu un petit mot pour vous le présenter succinctement : d'une longueur totale de 754, 75 mètres, ce pont a été érigé entre 1963 et 1967, soit prés d'un siècle et demi après la construction du Pont de Pierre (1812-1821). Ce pont Suspendu, d'une hauteur de 53 mètres, ne devait pas entraver la navigation en aval du port. Il constituait ainsi le second grand pont de France, par la portée de sa travée centrale, après le Pont de Tancarville. Les épreuves de réception eurent lieu le 1 avril 1967 et l'inauguration Officielle le 6 mai de la même année, en présence du Ministre de l'Équipement, M. Francois Ortoli.

Nous allons maintenant passer en détail ce pont suivant le plan suivant :
1 - Aperçu sur le problème du franchissment de la Garonne à Bordeaux
2 - Caractéristiques générales de l'ouvrage
3 - L'attribution des lots de travaux
4 - Le Viaduc d'accès
5 - Le massid d'Ancrage rive gauche
6 - Le massif d'Ancrage rive droite

Le mois prochain suivra :
7 - Fondation du pylone rive gauche
8 - Fondation du pylone rive droite
9 - La superstructure des pylones
10 - La partie métallique
11 - Les essais du pont
12 - Cout des travaux - Etudes - Direction


I. - APERÇU SUR LE PROBLÈME DU FRANCHISSEMENT DE LA GARONNE A BORDEAUX

La mise en Service du pont Suspendu de Bordeaux est apparu à l'époque comme un évènement important, tant en raison des Dimensions de l'ouvrage que de son rôle pour l'agglomération bordelaise et pour les grandes liaisons aboutissant à cette métropole régionale.
Un coup d'oeil rétrospectif sur le problème du franchissement de la Garonne à Bordeaux.
L'historien Camille Jullian écrivait « Bordeaux est un présent que la Garonne a fait à la France » et expliquait combien cette ville est admirablement située au point où se joignent la grande route commerciale conduisant à la Méditerrannée, avec la grande voie historique qui longe le continent, la route des , avec ses 500 m environ de largeur et ses fonds de vase ou terrains inconsistants, constitue un obstacle que la technique de construction des ponts n'a pu surmonter qu'au début du siècle dernier par l'édification du Pont de pierre. Auparavant le passage se faisait par bacs et bâteaux. La route de poste aboutissait à Lormont.
Mais depuis la fin du règne de Louis XIV on discutait de projets de pont. Sous Louis XVI, l'Ingénieur en Chef de la Généralité de Guyenne Le Ragots de Saint-André établit le projet d'un très bel ouvrage plus élevé.
Comme on demandait au duc de Richelieu de poser la première pierre de ce pont, ce gouverneur de Guyenne refusa et répondit avec esprit et perspicacité qu'il préférait poser la dernière. Quand il mourut juste avant la Révolution, rien n'était commencé.
Napoléon s'intéressa beaucoup personnellement au projet du pont de Bordeaux. En réalité, Napoléon n'eut pas le temps de construire le pont et c'est sous Louis XVIII que l'oeuvre fut menéeà bien, grâce au Préfet, le comte de Tournon, et à la Formation d'une compagnie de capitalistes qui assura le financement. Deschamps put faire admettre la solution du pont de pierre avec parements des Tympans en briques dont les Piles reposent sur des pieux de bois. Cet ouvrage remarquable fut Inauguré en 1821.
Cependant dès 1850 on trouve dans les Archives des délibérations réclamant un second pont routier qui ne fut construit qu'un siècle après. Entre temps le pont de chemin de fer sur la Garonne fut mis en Service en 1860.
Pour faire l'histoire des ponts de Bordeaux il faudrait mentionner bien des discussions et des projets, évoquer au passage le Président Fallières posant en 1910 la première pierre du pont transbordeur, le lancement du premier câble de ce pont qui ne fut jamais achevé, puis après la dernière guerre les projets de doublement du pont de pierre, son élargissement en 1954 et les discussions sur l'emPlacement en liaison avec les études du plan d'urbanisme.
M. l'Inspecteur Général Renoux, alors Ingénieur en Chef de la Gironde, parvint à faire aboutir le projet et ce fut à la suite d'une visite sur Place du Conseil Général des Ponts et Chaussées, en 1953 que l'emPlacement fut définitivement choisi. Les travaux furent déclarés d'utilité publique par la loi du 30 novembre 1956 et les terrains furent expropriés. Une première pierre symbolique fut posée par M. Buron, Ministre des Travaux Publics à la Culée du Viaduc le 20 mal 1960.
Le schéma de structure de la figure ci dessous qui constitue en quelque sorte une nouvelle version du plan d'urbanisme, montre l'emPlacement du pont à l'arrivée de l'autoroute de dégagement Nord et à 5 km à l'aval du pont de pierre.



Schéma des voies rapides de l'agglomération bordelaise.


II. - CARACTÉRISTIQUES GÉNÉRALES DE L'OUVRAGE

Le site dans lequel vient s'inscrire le nouveau pont de Bordeaux est constitué par la Garonne, large de 500 m, coulant entre les coteaux calcaires de la rive droite, d'une altitude de 50 à 60 m et la région plate de la rive gauche dont la cote est inférieure à celle des plus hautes eaux.
Les terrains de fondation, faits d'alluvions récentes sont mauvais dans la région proche du fleuve. C'est ainsi que sur la rive gauche le sous-sol est constitué par 8 à 10 m de vase, puis par 8 à 10 m de sables et graviers limoneux au-dessus de marnes assez hétérogènes.
Le Port Autonome de Bordeaux et la Marine Nationale ayant demandé que le tablier dégage un tirant d'air de 57 m au-dessus de l'étiage, le pont se trouve arriver tout naturellement à la hauteur de la colline de Lormont, sans qu'il y ait besoin ni de terrassement important ni de viaduc d'accès sur cette rive. Sur la rive gauche au contraire, ii a fallu un long viaduc de 1014 m qui permet de descendre avec une pente de 4,66 % jusqu'au niveau du terrain avoisinant.
Le chenal de navigation étant contigu à la rive droite une économie sur la portée de la travée centrale a pu être faite en implantant en rivière le Pylône rive gauche.
Les Dimensions de la brèche à franchir ont conduit à la solution classique du pont Suspendu et le Service Central d'Études Techniques du Ministère des Travaux Publics a donc dressé l'avant-projet d'un tel ouvrage comportant une travée centrale de 393,75 m et deux travées latérales de 143 m. Les Pylônes en Béton ont une hauteur de 105 m su-dessus de leur encastrement sur les massifs de fondation.
Le pont Suspendu correspond environ aux 2/3 du pont de Tancarville, mais par suite de la grande longueur du Viaduc, l'ensemble de l'ouvrage est plus long (1,767 m au lieu de 1,420 m).
La largeur entre garde-corps est de 20 m, comprenant une chaussée de 14 m, deux pistes cyclables de 150 m et deux trottoirs de 1,10 m. Les calculs des Tabliers ont été faits en prévoyant la possibilité d'élargir la chaussée à 17 m par suppression des pistes cyclables.
Il fût terminé le 6 mai 1967 avec son inauguration oficielle.


III. - L'ATTRIBUTION DES LOTS DE TRAVAUX

Les travaux du pont Suspendu proprement dit ont été divisés en cinq lots et attribués en 1962, mais les entrepreneurs de ces lots ont été conjoints et solidaires pour la signature du mArché et se sont groupés dans une Société portant le nom de Société Anonyme de Coordination des Travaux du Nouveau Pont de Bordeaux. Les travaux ont commencé en janvier 1963. Le Viaduc d'accès et sa Culée creuse avaient été construits auparavant.
L'attribution des lots à des entreprises ou groupes d'entreprises différents a permis d'adopter pour chaque lot la solution jugée la meilleure. L'emploi de la formule de l'appel d'offres avec concours sur avant-projet de l'Administration, pour l'attribution des travaux de génie civil de l'ouvrage principal a donné d'excellents résultats. En ouvrant ce concours, l'Administration recherchait d'abord de bonnes solutions pour les fondations, évitant l'emploi de l'air comprimé trop onéreux aux grandes profondeurs. Sur ce point l'Administration a tout lieu d'être satisfaite. Les procédés de fondation employés ne sont pas entièrement nouveaux mais n'avaient jamais été employés avec une telle ampleur, si bien que l'on peut dire que le pont de Bordeaux a marqué une étape pour les procédés de fondation profonde n'employant pas l'air comprimé. II y a lieu de noter que la construction du pont avait été précédée par une large campagne de sondages poursuivie sur plusieurs années et comportant en particulier l'utilisation du "standard penetration test". M. Kerisel a aidé l'Administration de ses précieux conseils dans le jugement du concours et tout au long de la réalisation des fondations.
Mais le concours portait aussi sur les superstructures dans le cadre de l'avant-projet avec possibilité de variantes et là aussi l'Administration n'a eu qu'à se féliciter de la méthode adoptée qui a permis notamment de réaliser des Pylônes d'un très heureux aspect.


IV. - LE Viaduc D'ACCÈS

Le Viaduc d'accès a une longueur de 1.014 m en y comprenant sa Culée d'about. Son profil en long est en pente uniforme de 4,66 %. Il comporte 21 travées indépendantes dont : 4 de 30,30 m de longueur ; 7 de 39,00 m ; 10 de 47,70 m.
Les Piles sont parallélépipédiques. Leur hauteur varie de 8,80 m à 43,35 m. Elles ont une largeur uniforme de 19,73 m. Dans le sens longitudinal leur épaisseur varie de 1,60 m à 3,50 m.
Les variations des portées des travées et des épaisseurs des Piles en fonction de la hauteur, sont le fruit d'une recherche de proportions harmonieuses sans alourdir l'économie du projet, notamment pour la pré-fabrication des Poutres et leur mise en Place qui nécessitent qu'il n'y ait pas trop de Types de Poutres différents.
Le Viaduc et sa Culée sont entièrement fondés sur pieux en Béton armé. Une campagne de sondages d'essais au sol ou de pieux d'essais avait permis de fixer les objectifs tant pour les caractéristiques des pieux que pour les couches à atteindre par battage.
La longueur des pieux a varié de 18 à 27 m suivant la profondeur de la couche de marne. Ils ont été fabriqués par les CHANTIERS MODERNES et battus par cette Société conjointement avec l'entreprise COURBOT.
Chaque Pile est fondée sur un groupe de pieux verticaux et obliques dont le nombre varie de 24 à 48 suivant le Type de travée et qui supportent une forte semelle en Béton armé sur laquelle est encastrée la Pile.
Les Piles sont creuses et raidies intérieurement par quatre cloisons intermédiaires placées à l'aplomb des Poutres du Tablier.
En ce qui concerne l'exécution des travaux il convient de signaler deux points intéressants : l'utilisation des Coffrages glissants pour la construction des Piles qui ont donné d'excellents résultats, notamment quant à l'aspect du parement, et le procédé de mise en Place des Poutres. Une vaste plate-forme, à l'arrière de la Culée, servait à la fabrication en Série des Poutres (ferrail-lage, Coffrage, coulage et Précontrainte) et à leur stockage avant mise en oeuvre.



Construction de la Culée creuse du Viaduc rive gauche.



Construction du Viaduc rive gauche.


V. - LE MASSIF D'Ancrage RIVE GAUCHE

Les massifs d'Ancrage reçoivent chacun les tiges d'Ancrage correspondant aux deux nappes de 37 câbles élémentaires constituant les câbles porteurs du pont Suspendu.
Les deux massifs d'Ancrage sont assez dissemblables par suite de la configuration différente des rives.
Le massif d'Ancrage rive gauche est comme le massif Ancrage rive gauche du pont de Tancarville un ouvrage très important. Le Service Central d'Études Techniques conçu suivant le même Type.
La superstructure est un volume creux en Béton armé reposant sur quatre massifs de fondation. Les massifs arrière n'ont supporté une charge importante qu'au moment de la construction de la superstructure. En Service les massifs avant supportent la plus grande partie des efforts.
Les cables porteurs s'ancrent dans les deux murs latéraux sur chacun desquels apparaît en relief une béquille qui met bien en évidence le fonctionnement du massif d'Ancrage. Des parois transversales servent de contreventement et la couverture constitue le support de la chaussée et des trottoirs.
Pendant la construction, on a mis en oeuvre, comme au pont de Tancarville, une Précontrainte provisoire pour redresser la réaction sur les articulations avant.
La Place a été prévue pour l'installation éventuelle d'ascenseurs qui permettraient aux piétons et cyclistes d'accéder sur le pont sans emprunter le Viaduc d'accès.
Le terrain est constitué à partir du niveau du sol par environ 2 m de remblai surmontant une couche de vase d'à peu près 9 m d'épaisseur. Au-dessous se trouve une épaisse couche de sables et graviers. La nappe phréatique est à 3 m de profondeur et peut en crue atteindre le niveau du terrain naturel.
Pour les fondations de cet important massif d'Ancrage le choix s'est porté sur une variante proposée par les Grands Travaux de Marseille, consistant à établir des Batardeaux circulaires constitués de parois en Béton forées et moulées dans le sol.
Pour chaque massif de fondation avant on a ainsi constitué trois cellules sécantes de 11,10 m de diamètre extérieur, de 0,60 m d'épaisseur et de 37 m de hauteur environ, ménageant ainsi une fiche supplémentaire de 3,00 m dans la marne au-dessous du fonds de fouille.
Chaque massif arrière a été constitué d'une cellule unique de 11,10 m de diamètre et de 23 m de hauteur. Pour ces massifs qui ne supportent pas de gros efforts une fondation dans les graviers a été jugée suffisante.



Construction de la superstructure du massif d'Ancrage rive gauche.



Massif d'Ancrage rive gauche.



Vue d'un puit de fondation.


VI. - LE MASSIF D'Ancrage RIVE DROITE

Le massif d'Ancrage rive droite est en Béton armé et en Béton Précontraint. Il comporte deux murs verticaux dans lesquels s'ancrent les câbles porteurs. Il s'appuie à l'avant sur deux fortes Piles obliques moulées dans le sol et repose sur un radier à l'arrière.
Le coteau de la rive droite est constitué par du calcaire médiocre avec inclusion de grave argileuse au-dessus d'une couche de 6 m d'épaisseur de sable aquifère.
Le grand intérêt du projet étudié par le bureau d'études de l'entreprise CAMPENON-BERNARD est qu'il permet de reporter à une grande profondeur sur du bon terrain la résultante des efforts appliqués au massif. Aucun désordre n'est à craindre pour le tunnel de la S.N.C.F. existant au voisinage.
Le massif présente la forme générale d'un Caisson de 35,80 m de longueur et de 24,70 m de largeur. Les murs d'Ancrage ont 3,80 m d'épaisseur comme ceux du massif d'Ancrage de la rive gauche.
Le poids total du massif, qui est d'environ 24 600 T se compose avec la Traction des câbles et l'effort indiqué ci-dessus transmis par le Tablier métallique pour donner une résultante inclinée sur la verticale. La position et la pente des puits de fondation ont été choisies de cette sorte que cette résultante passe à l'intérieur des puits, mais un peu en arrière de leur axe afin que le massif s'appuie encore sur le terrain par la semelle générale arrière.
Les puits de fondation constituent deux colonnes en Béton armé de 47 m de longueur et 6 m de diamètre.
Un appareillage complexe et divers permettra de mesurer toutes les déFormations possibles : déPlacements relatifs de la superstructure par rapport aux tètes de puits, rotation de la superstructure, raccourcissement élastique des puits, tassement des semelles.
Les colonnes ont été coulées à l'intérieur d'un cuvelage perdu en Béton armé exécuté par anneaux de 1,50 m au fur et à mesure de l'approfondissement des fouilles des puits. Le chantier n'a rencontré des difficultés qu'au passage de la couche de 6 m de sable aquifère où il y a eu des arrivées d'eau et quelques éboulements.



Massif d'Ancrage rive droite.



Maquette du massif d'Ancrage rive droite.

Pour la suite de ce dossier vous devrez attendre le mois prochain. Merci pour votre lecture et à bientot sur le site.



Date de denrière modification su site : Vendredi 30 Octobre 2015 à 10:32
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